Il y a certaines précautions à prendre lors de l’ouverture d’un compte bancaire à l’étranger. Je vous informe ici de ce qu’il faut savoir sur ce sujet d’actualité.
Q : Ai-je le droit d’ouvrir un compte à l’étranger ?
R : Oui, vous avez tout à fait le droit d’ouvrir un compte à l’étranger. Ce n’est pas du tout interdit. Ce compte à l’étranger peut être ouvert dans n’importe quel pays du monde, en Europe ou hors de l’Union Européenne. Vous n’avez aucune restriction à ouvrir un compte à l’étranger, à transférer tout ou une partie de vos avoirs sur un compte à l’étranger. Un compte épargne, un compte courant ou n’importe quel type de compte. Vous avez seulement des obligations très importantes à respecter vis-à-vis de l’administration fiscale française, mais en principe et de manière assez nette, vous avez tout à fait le droit de choisir le lieu où vous voulez déposer votre épargne.
Q : Ai-je des déclarations à faire ?
R : Oui, justement. Vous avez des déclarations fiscales à faire, et il est extrêmement important de respecter et de veiller à ce que vous ayez bien la trace que ces déclarations sont faites. Quelles sont-elles ?
On parle de l’imprimé numéro 3916 que devez souscrire au moment de l’ouverture de votre compte, puis en réalité chaque année ensuite. Ce document doit être joint à votre déclaration de revenus. Sur la déclaration de revenus que vous faites habituellement, vous devez joindre cet imprimé numéro 3916 qui en gros est un imprimé où vous recensez l’existence de votre compte à l’étranger et l’état des avoirs que vous avez. Enfin, ce n’est pas le montant des avoirs, mais c’est l’existence d’avoirs à l’étranger. Vous êtes obligé d’indiquer sur cet imprimé numéro 3916 tous les comptes que vous avez ouverts à l’étranger.
Q : Et alors, que se passe-t-il si je ne le fais pas ?
R : En fait, ce qui se passe si vous ne le faites pas, il faut bien comprendre que quand on ouvre un compte en banque en France, il y a un fichier qui s’appelle FICOBA qui est donné à l’administration fiscale de sorte que l’administration fiscale a connaissance de tous les comptes que vous ouvrez en France. Ce fichier FICOBA ne fonctionne pas ailleurs qu’en France. Il ne fonctionne pas en Europe, il ne fonctionne pas dans le monde. On parle d’échange automatique d’informations qui est un autre sujet. Mais si vous voulez, dès lors que l’administration n’a pas automatiquement l’information sur l’état des comptes à l’étranger, ça va changer avec l’échange automatique pour certains pays, mais dès lors qu’elle n’a pas cet échange automatique, elle réclame. Il y a un texte de loi qui prévoit cette obligation déclarative. Si vous n’avez pas rempli cette obligation déclarative, vous avez des effets violents, importants et vraiment redoutables.
La première chose, c’est que vous pouvez avoir une amende liée aux défauts de souscription de cet imprimé. Une amende liée chaque année pour défaut de déclaration du compte à l’étranger. Ça, c’est la première sanction.
La deuxième sanction, c’est que l’administration dispose d’un article de loi qui lui permet de présumer que toutes les sommes qui figurent sur votre compte à l’étranger sont des revenus imposables. Je vous donne un exemple. Vous avez par exemple hérité, vous avez posé une partie de cet héritage sur ce compte à l’étranger. L’administration va considérer et elle va vous opposer un texte de loi pour cela en disant : « je présume que c’est un revenu » et à vous de démontrer que ce n’est pas un revenu. Les redressements dont vous serez l’objet seront assortis de 80 % de majoration. Un impôt lui-même discutable, majoré de 80 %.
Vous aurez la charge de démontrer que les sommes qui figurent sur votre compte ne sont pas des revenus, ce qui en pratique peut être parfois compliqué à faire. Ça, c’est la deuxième arme que détient l’administration fiscale.
Et la troisième arme que détient l’administration fiscale et qu’elle utilise en ce moment même – c’est important –, c’est l’article L23C du livre des procédures fiscales où en gros, si vous ne justifiez pas de l’origine et de la nature des sommes qui figurent sur votre compte, elle peut soit donc considérer et les présumer être des revenus, ce que j’ai dit avant, soit ou sinon les considérer comme une libéralité.
En gros, elle peut considérer que cette somme qui figure sur un compte à l’étranger, dès lors que ce compte pas été déclaré, les sommes sont une libéralité d’un étranger. C’est en gros, une personne que vous ne connaissez pas qui vous a donné cette somme et donc comme tel, ça subit les droits de mutation au taux de 60 % pour défaut de déclaration d’une libéralité que vous auriez reçue avec 60 %. Donc on le voit : c’est assez catastrophique. C’est des conséquences qui sont extrêmement lourdes et extrêmement coûteuses.
Si vous voulez ouvrir un compte à l’étranger, faites attention de bien remplir cette obligation déclarative et de ne pas hésiter à envoyer cet imprimé en recommandé. Si vous avez déjà un compte à l’étranger sur lequel il n’y a pas beaucoup de sous ou il n’y a pas de sous du tout et que vous voulez rentrer dans un système de régularisation, posez-vous la question de savoir si vous n’auriez pas carrément intérêt à fermer ce compte et à en ouvrir un autre nouveau compte, et lorsque vous ouvrirez ce nouveau compte vous remplirez à ce moment-là vos obligations déclaratives très clairement et d’une manière complètement habituelle.
Frédéric Naïm, avocat fiscaliste à Paris